Une drôle de guerre, style 2025 ?

20.03.2025

Dans notre précédente contribution, nous avions déjà indiqué qu’il deviendrait rapidement évident quels plans annoncés par Trump seraient mis en œuvre dès son investiture. À l’époque, les marchés supposaient encore généralement que Trump ne serait pas si rapide à mettre à exécution tous les plans farfelus qu’il avait annoncés pendant la campagne.

Ils étaient auparavant considérés comme faisant partie de la tactique de négociation bien connue de Trump consistant à mettre d’abord son homologue sous une pression intense, puis à relâcher la pression pendant les négociations proprement dites. Entre-temps, nous avons reçu une certaine confirmation de cela, mais l’ombre du capricieux et (délibérément ?) imprévisible Trump continue de planer sur l’économie comme l’épée de Damoclès.

L’annonce par Trump de l’imposition de droits de douane de 25 % sur les produits en provenance du Canada (alors que le tarif sur le pétrole canadien n’est que de 10 %) et du Mexique, les deux plus grands partenaires commerciaux des États-Unis, et de 10 % sur les importations chinoises (son troisième partenaire commercial) a provoqué un choc sur les marchés. Aucun signe d’influence modératrice sur la politique de la part de Scott Bessent, le tout nouveau secrétaire américain au Trésor n’est venu apaiser les marchés qui ont paniqué provoquant une forte vague de ventes. Mais moins de 24 heures plus tard, les droits de douane à l’encontre du Canada et du Mexique avaient déjà été reportés d’un mois en échange de concessions auparavant symboliques de la part de ces pays : le Mexique enverra davantage de troupes dans la région frontalière et le Canada nommera un « tsar du fentanyl » pour mieux contrôler l’exportation de cette drogue vers les États-Unis. Détail marquant : seulement 0,2 % ou 20 kg de tout le fentanyl saisi aux frontières américaines provient du Canada… Le schéma semble désormais clair : en échange de concessions plutôt symboliques que Trump peut vendre à ses partisans comme une « victoire », ces pays s’abstiennent d’augmenter les droits de douane, du moins pour le moment. Mais la pression demeure car il ne s’agit que d’un sursis temporaire et l’on peut donc se demander si Trump n’augmentera pas ses exigences s’il subit des pressions intérieures, entre autres.

La deuxième question est de savoir ce qu’il adviendra des droits de douane sur la Chine et éventuellement l’UE, ceux-ci n’ayant pas de frontières avec les États-Unis, et donc les concessions sur la migration ou de contrôle sur le trafic de drogue n’étant pas à l’ordre du jour. Selon de nombreux économistes, la Chine est la véritable cible de la guerre des tarifs douaniers, comme elle l’était lors du premier mandat de Trump. Pour l’instant, l’évolution de la situation montre que les dégâts ne sont pas aussi graves que redouté. Les droits de douane de 10 % imposés par Trump restent bien en deçà des 60 % de droits d’importation qu’il avait annoncés pendant sa campagne. Et les contre-mesures de la Chine, qui consistent en des taxes sur quelque 80 produits d’une valeur d’environ 14 milliards de dollars et en une enquête antitrust sur Google, semblent également très modérées. La menace éventuelle de restreindre l’exportation de métaux essentiels aux États-Unis a peut-être fait la plus forte impression. On est en droit de se demander si cette campagne commerciale autour des droits de douane n’est en fait pas une pièce de théâtre politique destinée à satisfaire son électorat ou s’il s’agit réellement des premiers pas d’un processus d’escalade. Et qu’est-ce que cela signifie pour l’Union européenne, qui semble être la prochaine cible du ressentiment commercial de Trump ? L’Europe sera-t-elle également capable de négocier sa sortie du chantage commercial de Trump en promettant d’acheter davantage de produits américains ? Et cela signifie-t-il que le poulet chloré américain se retrouvera également dans votre assiette demain ?

Jusqu’à présent, Trump a été à la hauteur de sa réputation d’être un homme orienté business et ses contreparties devront apparemment simplement accepter ses tactiques d’intimidation. Est-ce que Scott Bessent et d’autres conseillers pourraient-ils exercer suffisamment d’influence sur Trump pour le maintenir dans le droit chemin ? Et qu’en est-il d’Elon Musk, qui a des intérêts majeurs en Chine et a donc consacré beaucoup de temps et d’efforts à entretenir de bonnes relations avec les dirigeants chinois ? Est-il l’intermédiaire entre Trump et Xi ? Chacun a son opinion, mais jusqu’à présent, la conclusion sur les marchés est que la guerre commerciale semble faire grand bruit pour pas grand-chose et il est encore très difficile de savoir si nous pouvons extrapoler cela pour l’avenir. Trump est notoirement imprévisible et impulsif, et il pourrait conclure que la faiblesse de ses adversaires lui permettra de faire monter ses exigences en matière d’échanges commerciaux. Ainsi, la paix armée pourrait être terminée avant que nous ne le sachions. Restez à l’écoute pour une année 2025 fascinante et volatile…

 

Christophe Van Canneyt
Chief Economist CapitalatWork SA

 

Article publié dans Voka Ondernemen

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