Au milieu du tumulte quotidien et des innombrables articles d’opinion, le message essentiel qui ressort du trimestre écoulé pour les investisseurs est le suivant : « Les taux d’intérêt resteront extrêmement bas pendant de nombreuses années encore. »
Alors que les gouvernements du monde entier dépensent de l’argent qu’ils ne possèdent pas, les banques centrales font tout pour promouvoir ce phénomène. Nous pouvons débattre sans fin du sens et de l’utilité de ces politiques fiscales et monétaires, mais nous devons aussi simplement faire face à la réalité.
Les États émettent de nouvelles obligations et celles-ci sont financées par les banques centrales qui les achètent pour les ajouter à leur bilan. Il s’agit du fameux assouplissement quantitatif (quantitative easing), tel qu’on le nomme dans le jargon. Cette façon de procéder rend l’intrication entre les gouvernements et les banques centrales plus profonde que jamais.
Notez toutefois que cette situation n’est pas sans précédent. Après la Seconde Guerre mondiale, la même approche a été utilisée aux États-Unis et au Royaume-Uni. Par une combinaison de taux bas et de l’acceptation d’une inflation plus élevée (et donc d’une croissance nominale importante), des montagnes de dettes ont fondu en l’espace de 10 ans. À notre époque, les taux bas ont été fortement favorisés pendant de nombreuses années par la politique monétaire des banques centrales. Dans sa dernière communication, la banque centrale américaine (la FED) indique ainsi explicitement que les taux seront maintenus à zéro jusqu’en… 2023. En d’autres mots, la première condition ouvrant la voie à la résorption de la dette (= les taux bas) semble déjà remplie. Il ne nous reste plus qu’à attendre et voir si les politiques monétaires et fiscales réussiront également à stimuler l’inflation.
Le plan a l’air parfait. Toutefois, ne nous leurrons pas. Si cette approche est probablement la plus acceptable d’un point de vue social, elle pourrait représenter un coup dur pour les épargnants, les investisseurs et les rentiers. La conjugaison d’une inflation élevée et de taux maintenus au plus bas débouchera immanquablement sur une perte de pouvoir d’achat : nous devons nous y préparer.
Il existe deux grands dangers au sein du contexte d’investissement à venir.
- Le premier, comme dit précédemment, est l’inflation potentiellement (plus) élevée.
- Le second est constitué par les faillites.
Voici comment nous comptons aborder concrètement le problème.
Risque d’inflation
La meilleure protection face à une augmentation de l’inflation est d’investir dans des entreprises qui parviennent à la répercuter sur leurs clients.
C’est-à-dire des entreprises qui possèdent le pouvoir de fixer leurs prix.
Pensez à Microsoft. Aucune entreprise n’annulera ses licences d’utilisation de Microsoft Office si leur prix augmente de 10 %. Pensez à Netflix. Peu de gens annuleront leur abonnement si son coût mensuel augmente de 2 euros. Il existe de nombreux exemples de ce type.
Ces entreprises qui ressortent plus fortes de la crise, telles que Microsoft, Amazon ou Google, ne sont plus bon marché après les récentes hausses de cours. Il existe cependant un consensus sur le modèle commercial supérieur de ces entreprises, c’est pourquoi elles méritent toujours une place dans un portefeuille. À l’autre bout du spectre, il y a des secteurs et des entreprises qui ont été particulièrement touchés par cette crise. Ces entreprises sont bien sûr beaucoup plus sujettes à discussion, mais, précisément pour cette raison, beaucoup moins chères si nous supposons que, d’ici 2022, la situation se sera normalisée. Pensez ainsi au secteur de l’aviation, donc à des sociétés comme Dufry, Vinci, Fraport, Safran, Airbus, etc.
Première conclusion : il n’y a pas de meilleure protection contre l’inflation que d’être investi dans les bonnes actions. Donc PAS dans des indices où l’on est investi dans tout, y compris le pétrole, les banques, etc. Les obligations indexées sur l’inflation peuvent offrir une deuxième protection contre celle-ci. Ces obligations émises par les gouvernements vous rapportent un intérêt plus l’inflation future.
Risque de faillite
Il ne suffit pas d’être investi dans des actions ou des obligations de sociétés ayant un pouvoir de fixation des prix. En effet, la qualité de leur bilan est tout aussi importante.
Une entreprise ne fait pas faillite parce que le climat économique se montre temporairement défavorable. Les entreprises sont toujours surévaluées lorsque leur endettement est trop important. Cela ne signifie pas que nous n’investissons que dans des entreprises qui n’ont pas de dettes. Toutefois, nous attachons une grande importance au fait que les bilans des entreprises dans lesquelles nous sommes investis soient en équilibre avec leur génération de flux de trésorerie disponible.
Conclusion
L’investissement est un contexte dans lequel certains risques majeurs doivent être pris en compte. C’est pourquoi la situation actuelle ne se prête pas à une gestion indicielle, mais plutôt à une gestion active portée par des choix clairs et étudiés. Comme toujours, nous souhaitons conclure par une citation controversée, qui vise à nous faire réfléchir :
« Invest in the strongest companies, or watch some governments spend you into poverty »